Quand j’étais matelot

Quand j’étais matelot

Legimi

Un récit de croisière à la voile rare et moderne. Été 1925, de jeunes filles naviguent à la voile vers la Grèce de Marseille à Athènes. Elles ont une vingtaine d’années, libres et intrépides, visitent les îles et les sites archéologiques qui ne sont pas encore envahis par les touristes, rencontrent la flotte anglaise, font la fête, mais connaissent aussi des galères. Cette croisière à bord de Bonita, un vieux yawl sans moteur, réunit Hermine de Saussure le capitaine, Ella Maillart, Marthe Oulié l’auteure et archéologue, Mariel Jean-Brunhes, Yvonne de Saussure, soeur aînée d’Hermine et leur frère Henri-Benedict qui les rejoindra en cours de navigation. Un récit de croisière à la voile rare et moderne il y a plus de quatre-vingt-dix années. Le livre a été publié une première fois en 1930. Découvrez les aventures d'Hermine, Ella, Marthe, Mariel, Yvonne et Henri-Benedict à bord de Bonita, un vieu yawl sans moteur, lancés à la conquête des îles grecs. EXTRAIT Ce courrier de Naples semble le maître tyrannique du port de Palerme : aux moments de son entrée et de sa sortie, les voiliers n’ont pas le droit de circuler. Pendant les heures qui précèdent son départ, les boîtes aux lettres de la ville sont uniquement réservées à son service. Les jours suivants, nous errons d’église en église, de palais en palais, à la découverte de cet art normand, si somptueux et si fantaisiste, qui tient à la fois du mauresque, du roman et du gothique. Les mosaïques surtout nous émerveillent au palais du roi Roger et à Monreale, dont la basilique, à qui certains reprochent le clinquant de ses couleurs vives et de ses ors, côtoie le cloître aux si frêles colonnades. Est-ce dans l’église de la Martorana que nous vîmes cette étonnante madone du XVIIIe siècle peinte dans le costume décolleté d’une marquise de Watteau ? Et quelle émotion de se trouver au musée en face des bas-reliefs, des métopes de Sélinonte ! À ces visions artistiques se mêle en moi le souvenir d’avenues de palmiers où, vers cinq heures, des attelages désuets et pleins de morgue caracolaient ; d’autres rues, populaires, grouillantes et poussiéreuses ; et de haltes dans des boutiques où les plus étranges pâtisseries et ces glaces siciliennes gelati et granite réparaient nos forces, avant le retour dans notre maison marine… dont une couchette demeurait vide. Mais cette ville superbe en plein mois d’août, nous oppressait, à vrai dire. Les grands temples de l’ouest et du sud nous attiraient. Et bientôt, nous nous trouvions, bâton en main et musette à l’épaule, sur la grande route en lacets qui mène à Ségeste. De temps à autre, nous croisions une de ces pittoresques charrettes peintes avec la naïveté et le vif coloris des images d’Épinal, retraçant en quatre tableaux les aventures de Geneviève de Brabant ou celles de Roland. Comme les beaux vases antiques, ces candides peintures étaient signées en toutes lettres du double nom du constructeur de charrettes et du décorateur. Quant aux chevaux, assez jolis, ils n’ont pas de mors. On les conduit au moyen d’un anneau capitonné qui leur encercle le museau.

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