Mon père, ce collabo
Legimi
Comment supporter que son histoire personnelle soit mêlée à l'horreur de l'Histoire ? Jean Buvens a 10 ans, en 1944, lorsqu’il comprend peu à peu le rôle de ses parents pendant la Seconde Guerre mondiale : sa mère parcourt les rues de Bruxelles à la recherche de noms juifs sur les sonnettes, son père revient les soirs de rafles les bras remplis de jouets d’enfants. Chauffeur pour la Gestapo, son père aidera les nazis en tant que dénonciateur mais, une fois leur pion devenu inutile, les Allemands n’hésiteront pas à les exiler, lui et sa famille, dans une cave en Allemagne. Jean, petit garçon, observe les actions de ses parents, perplexe, en tentant tant bien que mal de discerner leurs actes corrects et ceux, honteux, bien plus nombreux. Voici les effets collatéraux de la guerre sur un enfant et le développement d'une relation d’amour et de haine vis-à-vis de ses parents devenus collaborateurs de l’occupant pendant la Seconde Guerre mondiale. Jean Buvens, aujourd’hui, veut exprimer, en son nom, les plus profonds et sincères regrets pour l’irréparable commis par ses parents. Un témoignage bouleversant sur la terrible culpabilité portée par le fils d'un couple de collaborateurs. EXTRAIT Il n’était pas encore sept heures du matin, le samedi 2 septembre 1944, lorsque ma mère vint me réveiller. Au ton de sa voix, je sus qu’il aurait été dangereux de ne pas obtempérer. Mais ce ne fut pas seulement le ton de sa voix qui me fit bondir du lit. Ni la peur d’une réprimande. C’était aussi parce que j’avais, dans toute sa façon d’être, perçu de l’inquiétude. Ma mère était nerveuse comme je l’avais rarement vue. Et moi, j’étais excité à cause de la rentrée des classes. Comme chaque année, il fallait malheureusement en ce début septembre retourner à l’école. Et cette année, pendant les vacances, ma mère n’avait pas préparé avec moi mon cartable pour cette rentrée détestée. J’étais donc curieux de savoir comment elle allait se dérouler. Debout, je me dirigeai vers la cuisine où l’évier nous servait également de cuvette pour nos ablutions. L’appartement n’avait pas de salle de bain, comme cela était souvent le cas à l’époque. Pour me rendre à la cuisine, je devais passer par la chambre de mes parents qui d’habitude était rangée, le lit fait, mais qui ce matin-là ressemblait plutôt à un chantier. Sur le lit des parents, il n’y avait plus que le matelas. Les draps de lit et les couvertures avaient disparu. Les portes de la garde-robe béaient sur une armoire vide. Les tiroirs de la commode étaient également ouverts et vides. Au pied du lit se trouvait alignée une demi-douzaine de valises plus ou moins grandes. CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE Le terrible récit de Jean Buvens, enfant de la Seconde Guerre mondiale, qui n’a pu qu’observer, consterné mais impuissant, les actes de ses parents. - Pierre De Vuyst, Le Soir À PROPOS DE L'AUTEUR Jean Buvens est né en 1934, a été policier durant trente-cinq ans et est actuellement retraité.
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