Les voleurs d'énergie

Les voleurs d'énergie

Legimi

Une analyse critique de la gestion et de l'exploitation des sources d'énergie au XXIe siècle. Chauffage, éclairage, mobilité, alimentation, production de biens et de services… l’énergie est à chaque instant au cœur des activités humaines. Le contrôle de sa production, de sa diffusion et de sa distribution est hautement stratégique. Source de conflits, voire de guerres, l’exploitation et la consommation énergétique sont très inégalitaires, accentuent les déséquilibres entre nations riches et pauvres et entraînent des risques majeurs pour l’homme et son environnement. Ce livre raconte, pour la première fois, l’histoire de la propriété des énergies et des systèmes mis en place pour les exploiter. Privée à l’origine, l’énergie devint largement publique au cours du XXe siècle. La France ne fut pas le seul pays à nationaliser l’énergie ; un mouvement quasi-mondial s’est développé pour mettre fin aux abus scandaleux des grands groupes privés. Aujourd’hui, le privé veut reprendre l’exploitation des énergies par tous les moyens : saccage d’entreprises nationales publiques comme EDF, adoption de directives ultralibérales par l’Union européenne, ouvertures à la concurrence forcées pour les pays du Sud… Alors que les activités pétrolières ont déjà largement été reconquises par les multinationales, les services publics de l’électricité et du gaz sont attaqués partout sur la planète. Comme pour le transport ferroviaire, l’eau ou les déchets, la santé ou l’éducation, il s’agit de transférer aux grandes firmes privées une activité très rentable, niant aux citoyens tout droit de regard sur cette industrie qui les concerne dans leur quotidien et leur devenir. Découvrez, au travers d'un ouvrage fourni, une réflexion originale pour reconstruire un service public des énergies qui réponde aux enjeux sociaux et environnementaux de notre époque. EXTRAIT Dans les pays du Sud, la question énergétique s’est longtemps confondue avec la question pétrolière et celle de l’indépendance nationale, conduisant à de fortes tensions avec les pays riches. Pour la France, le Royaume-Uni ou les Pays-Bas de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, les colonies et les pays pauvres sous influences sont le moyen d’accéder directement à des ressources de brut. Quant aux firmes américaines, elles étendirent rapidement leurs prospections au-delà du territoire national, notamment sur le reste du continent. Lorsque certains gouvernements de pays dominés, qu’ils fussent démocratiques ou autoritaires, cherchèrent à s’émanciper de la tutelle occidentale, la propriété des systèmes énergétiques devint pour eux une préoccupation centrale. Indépendantisme énergétique en Amérique latine En 1921, la Standard Oil s’implante en Bolivie. L’année précédente, un coup d’État mené par les Républicains a chassé les libéraux du pouvoir, mais n’a pas modifié la propriété privée des ressources. Dans le Paraguay voisin, c’est la Royal Dutch Shell qui contrôle le pétrole. À la fin de la décennie, les deux compagnies anglo-saxonnes pensent que le sous-sol de la région de Gran Chaco, revendiquée à la fois par la Bolivie et le Paraguay, contient des hydrocarbures. Cette présence supposée de ressources dans le contexte tendu de la Grande Dépression conduit les deux pays à entrer en conflit armé. Entre 1932 et 1935, la guerre du Chaco fait, selon les estimations, de 85 à 130 000 morts. Le Paraguay gagnera la majeure partie du territoire contesté, mais aucun hydrocarbure n’y sera trouvé… avant 2012. À PROPOS DE L'AUTEUR Aurélien Bernier a travaillé dix ans pour l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME). Essayiste et conférencier, il collabore régulièrement au Monde diplomatique. Dernières publications : Comment la mondialisation a tuée l’écologie (Mille et une nuits, 2012); La gauche radicale et ses tabous (Seuil, 2014); La démondialisation ou le chaos (Utopia, 2016).

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