Le Monde selon Cheng
Legimi
Aventures en terre imaginaire Cheng, un jeune ficeleur d’asperges né dans l’empire de Camelote, s’endort malencontreusement dans un container rempli de légumes pour se réveiller à l’autre bout du monde. Dérivant dans un univers où tout est devenu low cost, il vogue de rencontre en rencontre et tente de comprendre qui tire les ficelles de cette société à la recherche perpétuelle du coût le plus bas. Le Monde selon Cheng est un conte contemporain aigre-doux sur le thème de la valeur. Poussant à l’extrême la logique mercantile du monde tel qu’il tourne, il explore avec brio et simplicité les abysses vers lesquels nous entraîne la quête effrénée du moindre coût. Une dystopie qui expose et dénonce implicitement les valeurs sociales de notre époque EXTRAIT Nous vivons comme des brutes, disait mon père. Depuis que le monde a changé, nous vivons comme des brutes et plus rien n’a de valeur. Quand il parlait ainsi, il prenait un air grave, mais la plupart du temps, c’était un homme joyeux, surtout avec moi. Je m’appelle Cheng l’Asperge, je suis haut comme trois pommes, je sais à peine lire, je sais compter. Je suis né au royaume de Camelote mais j’ai vécu ailleurs. Mon père est ficeleur d’asperges, comme ma mère et mes soeurs. Jusqu’à mon départ, je passais mes journées sur la zone de conditionnement, entre le port et l’aéroport, entre ciel et mer. Avec mon père, ma mère et mes soeurs. Le matin, nous nous levions tôt, nous buvions du soda en regardant des jeux sur le poste de télévision, et nous partions tous ensemble attendre le camion. Il faisait encore nuit. D’abord, nous entendions le moteur, les grincements des suspensions qui ressemblaient à des souffles d’épuisement, ces bruits nous parvenaient par vagues successives, puis nous apercevions les rais des phares qui partaient dans tous les sens parce qu’il y avait des trous énormes dans la route, et enfin nous sentions l’odeur d’huile chaude de la machine. J’aimais m’asseoir à côté de mon père sur le plateau du camion. Mes soeurs dormaient contre ma mère, qui dormait aussi. Pas mon père. Ni moi. Mes soeurs et moi faisions partie des enfants qui n’allaient pas à l’école. Il y avait de plus en plus d’enfants qui n’allaient plus à l’école depuis qu’elle n’était plus obligatoire dans notre région. Mon père m’apprenait à compter. À trois ans, je savais compter jusqu’à cent mille. À quatre ans, j’ai compris l’infini. L’infini, c’est quand on ne peut plus compter. Cela donne le vertige et cela fait peur aussi. CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE - "En moins de cent pages, Stéphane Reynaud a réussi à raconter le monde tel qu’il ne va pas. Une réussite." (Mohammed Aïssaoui, Le Figaro) - "Un conte cruel, doublé d’un joli premier roman." (VSD) - " Micromegas futuriste et malheureusement très plausible sous de nombreux aspects, Le Monde selon Cheng pose la question de la valeur, et fait le lien entre le côté marchand et le côté éthique de cette notion fondamentale. Un livre incisif et élégant." (Yaël Hirsch, Toute la culture.com) - "Une dérive désenchantée qui flingue les ayatollahs du coût bas." (Télé Poche) A PROPOS DE L'AUTEUR Stéphane Reynaud est journaliste, rédacteur en chef des pages « Style et Art de Vivre » au Figaro. Il est l’auteur de plusieurs essais dont Glamour business (2008), et No Low Cost (2009). Il a également publié Dans les cuisines de la République (2010). Le Monde selon Cheng est son premier roman.
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