La Ricarde

La Ricarde

Legimi

Quand un antihéros doit se mettre sur la pointe des pieds pour vivre à hauteur d’espoir... Bernard Gautier (sans h), vendeur de chaussures de son état, n’est pas vraiment taillé pour la promiscuité, les apéritifs en société et la fréquentation des autres en général. Mais le gain inopiné d’une caravane le mène à la Ricarde, camping autogéré où séjournent principalement d’anciens fonctionnaires de l’Éducation Nationale. Entre montées d’hormones et petits désagréments de la vie en communauté, BG tentera de trouver ses marques et de se faire un (sur)nom. Mais peut-on vraiment s’intégrer quand on s’appelle Bernard Gautier? La Ricarde, c’est à la fois la caricature drolatique et la description clinique d’un petit monde à l’humour souvent truculent. EXTRAIT – Encore un peu à droite. On pousse, encore, encore, encore… Top ! La roue s’est calée dans le trou, comme un arpion dans une charentaise. – Simone, va me chercher le Niveau. Dans ma boîte à outils. Il a dit Niveau avec un N majuscule. Le Niveau, c’est l’arme absolue. Il est au campeur ce qu’Excalibur est à Arthur ou la couperose à Roger au comptoir : plus qu’un emblème, une légitimation. Simone part sans un mot, elle doit savoir où est la boîte à outils, sans doute sous le châssis, près de la pelle américaine repliable qu’elle a déjà dû apporter tout à l’heure pour que Bébert entame la terre rougeâtre et poussiéreuse de ma parcelle en pente douce, afin d’approfondir la cavité laissée par mes prédécesseurs – du travail d’amateur. Ils sont quatre bonshommes en short tergal avec braguette zippée, torse nu autour de ma caravane, Dédé, Bébert, Nico et un dont j’ai oublié le nom, sans compter ceux qui regardent à quelques mètres de distance, les mains sur les hanches, ou depuis leur installation, planqués derrière L’Équipe. À cette virile assemblée s’ajoutent deux ou trois épouses en robe de coton éponge à bouclettes dans des tons layette, dont Simone qui revient avec l’outil. – Ouvre voir la porte, Bernard. Bien qu’encore désarçonné par le tutoiement, je m’exécute d’un diligent tour de clé. A PROPOS DE L’AUTEUR Après Monsieur Quincampoix (2006), Fred Bocquet nous revient avec son amour des mots tarabiscotés et ses phrases bien torchées. Elle s’attaque à la beauferie, à la médiocrité, au manque de solidarité humaine et aux principes trop bien ancrés. Mais en arrière-fond, ce sont les blessures d’enfance, la difficulté d’être et le manque d’amour qui s’attachent au pas de ses héros. Avec tendresse, mais sans pitié pour les personnages qu’elle croque, elle s’en donne à cœur joie dans son style où l’on retrouve un petit peu d’Audiard et de Jean‑Paul Dubois, une certaine cruauté féminine en plus.

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