L’initiation chrétienne hier et aujourd’hui
Legimi
EditorialLe 26 septembre dernier, une journée d’études, co-organisée avec la Luxembourg School of Religion & Society, en lien avec le Service du catéchuménat de l’archidiocèse de Luxembourg et l’Amicale des étudiants en théologie de Metz, que nous remercions, a rassemblé un public nombreux de patrologues et d’acteurs de la catéchèse et de la pastorale à Metz. Nous en publions les Actes dans ce numéro. L’initiation chrétienne chez les Pères de l’Église n’est pas sans analogie avec le catéchuménat, qui a été restauré par le concile Vatican II, qui a justement effectué un retour aux Pères de l’Église. Force est, en effet, de noter une double analogie, d’une part quant à l’âge : l’initiation chrétienne et le catéchuménat interviennent à l’âge adulte, ce qui suppose une formation complète, d’autre part, le contexte dans lequel ils s’effectuent : s’il est différent en fonction de l’époque, il n’en est pas moins proche, dans la mesure où le catéchuménat ne se situe plus par rapport au paganisme antique, mais face aux nouvelles religiosités (1), qui, sur certains points, n’en sont pas très différentes, ce qui amène à réfléchir sur la notion d’initiation, comme l’a fait Louis Bouyer (2) et comme le réalise ici Jean-Marie Brauns, qui a consacré sa thèse à la question. Dans ces conditions, nous comprenons qu’il n’est pas inutile de revisiter les textes des Pères, les méthodes qu’ils ont proposées, non pas tant pour les reprendre comme telles, que pour voir leur apport et les mettre en perspectivepour aujourd’hui. Tel est l’objectif du Rituel de l’initiation chrétienne des adultes que présente Daniel Laliberté. Il est seulement dommage que, mis à part le récit d’Égérie et les découvertes archéologiques, étudiées, en particulier, par Victor Saxer (3), on ne dispose pas d’informations précises sur le déroulement de l’initiation chrétienne, sur les échanges qui sont intervenus entre les catéchumènes et leurs accompagnateurs, si ce n’est dans le De catechizandis rudibus, la grande catéchèse d’Augustin. Si les convergences sont importantes entre hier et aujourd’hui, une différence intervient, cependant, quant au statut des catéchumènes dans la communauté. Si, dans les premiers siècles, les catéchumènes constituaient les communautés naissantes et leur rappelaient chaque année, à Pâques, la création nouvelle qui se réalise par le baptême, aujourd’hui, « ils transforment davantage la communauté établie et lui redisent son incessante démarche de conversion, lui rappelant qu’elle existe par grâce (4) ». À partir de ces quelques remarques préliminaires, qui seront complétées par les différents articles de ce numéro, on remarque déjà que l’initiation chrétienne a non seulement un enjeu personnel qui permet au nouveau converti de trouver son identité chrétienne, mais également un enjeu ecclésiologique, du fait que le nouveau baptisé s’insère dans la communauté et la transforme, comme le montre Bruno Hayet. En lien avec les recherches déjà menées dans le cadre de la catéchèse (CPE n° 91) et de la mystagogie (CPE n° 126), ce numéro donne un aperçu de l’initiation chrétienne dans les premiers siècles. Mgr Job de Telmessos explique à quel point elle est restée vivante dans l’Église d’Orient avec le caractère indissociable des trois sacrements de l’initiation. Mgr Roland Minnerath précise comment, dans le diocèse de Dijon, la confirmation reprend sa véritable place parmi les sacrements de l’initiation. Michel van Parys, Emmanuel Bohler et Philippe Molac rappellent l’apport des Cappadociens, respectivement de Grégoire de Nysse et de Basile de Césarée, Patrick Muller fait ressortir celui de Jean Chrysostome. Il reste un auteur qui a beaucoup apporté dans un style différent, c’est Augustin d’Hippone. Aussi reprendrons- nous les grandes lignes de sa Première catéchèse, qui est originale, mais moderne, et pourrait servir dans le catéchuménat actuel. Nous noterons simplement ici la différence entre les catéchèses baptismales et les catéchèses mystagogiques dans l’initiation chrétienne aux premiers siècles. Si les catéchèses baptismales des Pères constituent à proprement parler l’initiation chrétienne, les catéchèses mystagogiques, qui interviennent après le baptême, ont pour fonction d’expliquer aux nouveaux baptisés les sacrements qu’ils sont en train de vivre : le baptême, la chrismation et l’eucharistie. Aujourd’hui, la mystagogie prend un nouvel essor dans le catéchuménat. Elle est plus répandue que chez les Pères et fait l’objet de différentes expérimentations aujourd’hui, comme l’a expliqué Louis-Marie Chauvet dans le numéro 126 de Connaissance des Pères de l’Église consacré à la mystagogie ou encore, comme le propose Christian Salenson dans son ouvrage intitulé Catéchèses mystagogiques pour aujourd’hui. Habiter l’eucharistie (Bayard, 2008). L’intérêt tient ici à l’immersion immédiate du nouveau baptisé, voire du catéchumène, dans la communauté et à un dialogue, expliquant les différents gestes qui sont posés. Mais je ne voudrais pas anticiper l’article de François-Xavier Amherdt, qui a travaillé sur la catéchèse intergénérationelle et le chemin néo-catéchuménal pour tous dans l’esprit des Pères de l’Église, ni celui de Renée Schmit qui présentera un exemple original et parlant, celui de Nicolas Cabasilas, ce laïc qui au xive siècle a proposé une vie en Christ pour tous. Marie-Anne VANNIER -------------------------- SOMMAIRE 1. Cf. J.-M. Verlinde, Le christianisme au défi des nouvelles religiosités, Paris, Presses de la Renaissance, 2002.2. L. Bouyer, L’initiation chrétienne, Paris, Cerf, 1958.3. V. Saxer, Les rites de l’initiation chrétienne du iie au vie siècle. Esquisse historique et signification d’aprèsleurs principaux témoins, Spolète, Centro italiano di studi sull’Alto Medioevo, vol. VII, 1988.4. A. Rouet, Catéchuménat. Un chemin de vie, Paris, Cerf, 2000, p. 1.
45.11 PLN