Le travail de l'éthique
Legimi
Comment aborder les conflits de valeurs qui sont omniprésents dans le domaine médical et dans notre société ? L’approche de la bioéthique consiste à rechercher des normes qui emporteraient l’approbation de tous. Devant l’évidence d’un pluralisme moral irréductible, Marta Spranzi propose au contraire de partir des situations particulières, dans lesquelles on recherche ce qu’il serait bien de faire : c’est l’approche de l’éthique clinique. Une conception « heuristique » de l’éthique permet de sonder l’expérience morale et les valeurs des personnes concernées par une décision difficile, qu’ils soient patients, proches ou professionnels de santé. Ni consensus ni compromis, la bonne décision est celle qui, dans le contexte, apparaît aux participants comme la plus acceptable. Cette pratique de l’éthique est empirique et démocratique : elle explore le terrain changeant de la décision clinique et donne la parole aux premiers concernés. Cet ouvrage porte sur les outils de l’éthique clinique et sur ses fondements, les intuitions morales des personnes concernées par une décision critique. Il explore l’importance des cas, la traduction des principes généraux, l’engagement des acteurs, et défend une forme d’intuitionnisme moral critique. Il prend comme exemple les questions de fin de vie et s’appuie sur la discussion de plusieurs cas emblématiques. Découvrez un ouvrage qui porte sur les outils de l'éthique clinique et ses fondements, les intuitions morales des personnes concernées par une décision critique. EXTRAIT Ce cas avait relancé la question de la légalisation de l’euthanasie active : perçue parfois comme une nécessité par les médecins eux-mêmes, et faisant l’objet d’une revendication de la part de certains, elle n’en reste pas moins, pour d’autres, une pratique violant un interdit majeur. Le premier objectif de la loi est donc de permettre au personnel médical de répondre à des demandes comme celle de Vincent Humbert, sans en passer par l’administration de produits létaux ou euthanasie active au sens technique du terme. Son deuxième objectif est de répondre à une exigence ressentie par les médecins, et notamment par les réanimateurs : distinguer explicitement les gestes de fin de vie passifs (de retrait de soutien vital) des gestes de fin de vie actifs (d’administration directe de produits létaux), qui étaient souvent mêlés dans la pratique. La réponse inscrite non seulement dans la loi, mais également dans les recommandations de différentes sociétés médicales savantes, consiste à distinguer de façon nette deux types de gestes médicaux : d’une part ceux qui visent à entraîner directement et intentionnellement la mort d’un patient, qui restent illégitimes ; d’autre part ceux qui visent à permettre au processus de la mort de se réaliser naturellement, par un arrêt ou une limitation de traitements (LAT), ou encore par une abstention thérapeutique, gestes qui sont donc explicitement autorisés à certaines conditions, que les traitements puissent être considérés comme une « obstination déraisonnable », que la décision soit prise de façon collégiale et avec l’accord du patient si celui-ci est à même de consentir. A PROPOS DE L'AUTEUR Formée en philosophie des sciences en Italie, en France et aux États-Unis, Marta Spranzi est maître de conférences à l’université de Versailles St-Quentinen-Yvelines, et chargée de mission au Centre d’éthique clinique (AP-HP). Après s’être intéressée à la tradition de la dialectique et à la logique du débat, elle travaille aujourd’hui sur l’épistémologie de l’éthique clinique et sur les questions éthiques que pose la pratique médicale.
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