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Legimi
Réflexion sur le journalisme de guerre et ses implications. L'histoire du journalisme de guerre offre des exemples exceptionnels de courage et d'excellence, d'erreurs et de dérives aussi. Ce livre dépasse le portrait des "baroudeurs de l'info" pour soulever les grandes questions auxquelles ceux-ci ne peuvent se soustraire : comment conserver son indépendance alors que tout pousse au parti paris ? Comment gérer la peur et les risques ? Comment dire l'horreur ? Comment oser aller à contre-courant de l'actualité, pour prévenir des nuages qui s'accumulent, couvrir les "conflits oubliés" du bout du monde et revenir sur les guerres passées ? Découvrez un ouvrage qui, allant au-delà du portrait de "baroudeurs de l'info", soulève les grandes questions auxquelles les journalistes de guerre ne peuvent se soustraire ! EXTRAIT Quelques-uns, cependant, ont choisi de tout simplement dire la vérité. Lors de la guerre de Crimée (1853-56), l’envoyé spécial du Times, William Howard Russell, refusa d’encenser les généraux qui exposaient leurs propres troupes à des dangers insensés et les condamnaient à des conditions de vie infâme. « En portant à la connaissance de la nation britannique la souffrance de ces troupes, William Russell sauva les rescapés de ces grands bataillons que nous avions débarqués en septembre », s’exclama Sir Evelyn Wood, un éminent officier de sa Gracieuse Majesté. Son rédacteur en chef, John Thadeus Delane, membre éminent de l’establishment, l’appuya sans réserve et rédigea un des éditoriaux les plus fameux de l’histoire du journalisme de guerre : « L’armée la plus noble partie de nos rivages a été sacrifiée à la gabegie la plus grossière, écrivit-il. L’incompétence, la léthargie, la morgue aristocratique, la perversité et la stupidité règnent. Le Commandant en chef et son staff ont survécu sur les hauteurs de Sébastopol, ils ont été décorés, anoblis, dûment cités dépêche après dépêche, et ils rentrent chez eux pour jouir de pensions et d’honneurs au milieu des os de 50 000 soldats britanniques. » Lors de la Première Guerre mondiale, la grande presse choisit massivement le camp des généraux et elle se gagna l’hostilité des soldats parce qu’elle mentait sur la réalité de la guerre. La naissance de la « presse de tranchée », dont le fameux Canard enchaîné, s’explique aussi par ce rejet d’une presse aux ordres, qui présentait un tableau embelli de la guerre et célébrait la grandeur des gradés arrogants qui envoyaient les poilus à la boucherie. « Au fil des mois, se creusa un fossé croissant entre soldats et arrière, entre informations publiées et réalité, écrit l’historien Bernard Cahier. La presse le payera très cher après la guerre. » À PROPOS DE L'AUTEUR Jean-Paul Marthoz est journaliste, chroniqueur au Soir, professeur invité de journalisme international à l'Université de Louvain, auteur de nombreux ouvrages sur le journalisme international, dont Objectif Bastogne. Sur les traces des reporters de guerre américains. Il a été directeur européen de l'information de Human Rights Watch et correspondant en Europe du Committee to Protect Journalists. Il a couvert l'Amérique centrale en guerre, le Pérou du Sentier lumineux, la Colombie des narcos et pris part à des missions lors des années de plomb en Algérie, en Afrique du Sud et en Turquie.
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